Voile de béton, une porcherie en forme de cochon…
Etat de la demande
La demande est claire : donner un signe fort, une présence à l’un des accès de la ferme.
Cette construction n’a donc pas seulement une raison fonctionnelle (abriter un cochon), mais il faut aussi qu’elle réponde à des exigences esthétiques, devenir signes pour transformer un lieu accessoire en une entrée évidente et attirante.
Il y a donc un double besoin qui n’avait pas été identifié clairement au départ. Chacun peut ainsi se rendre compte que dans une démarche de création, il est essentiel de tenir compte de la fonction de chaque chose.
Il faut aussi se mettre dans l’œil du spectateur : Quelle interpellation, quel choc désirons-nous créer… ?
Il s’agit ici de donner une présence forte, il ne faut pas seulement fabriquer un » ajout » à une structure existante, mais répondre à un besoin. Ceci est un garant pour que le projet perdure, qu’il se poursuive après ce temps fort du chantier, motivé par l’envie qui est le moteur essentiel de toute action.
Un questionnement est ici apparu sur la notion de projet d’équipe. » Jusqu’où peut-on aller ? « . Ce chantier est une nouvelle étape dans le cheminement créatif. On dépasse la réalisation individuelle en atelier, pour passer à la dimension plus architecturale et communautaire.. Cette solidarité, ce rassemblement autour du rêve d’un animateur (porté par les projets des enfants), cela ne se retrouve pas souvent dans le domaine culturel.
Il a lieu ici peut-être parce que nous sommes dans un environnement paysan. C’est quelque part » une solidarité paysanne ».
Ressentir ce genre de chose est impayable, c’est la richesse de ce genre de rencontres, c’est l’inattendu qui apporte un plus, un dynamisme qui permet d’aller plus loin. L’art, ce n’est rien d’autre que cela. C’est aussi et surtout de sentiments qu’il est question, c’est une expérience de vie. On est à cent lieux de l’art rébarbatif développé par certaines élites bien pensantes.
L’art, c’est aussi pouvoir se payer le rêve d’un animateur, le rêve d’enfants. Ici, c’est permis et il est parfois utile de s’en rendre compte. Pour arriver à réaliser ce qui va se monter, il faut une ambiance comme sur ce lieu de formation. C’est une manière de rester logique avec les propres options de ce lieu. Finalement, c’est toute la notion de projet qui est travaillée en profondeur. Pour marcher, un projet doit être bienvenu, il doit partir du désir.
Ensuite, il y a toute la part technique dont il est essentiel de tenir compte. Il y a, à la fois, le respect de ce qui a été fait, de ce qui existe. Pour aller plus loin, il faut pouvoir tenir compte des contraintes et des libertés. Il faut se poser la question primordiale du » de quoi s’agit-il ? « , faire l’état de la demande.
Il faut que cela soit clair pour nous pour que ce soit clair pour les autres. Quand on arrive à définir tout cela, régler un problème en cours de route devient facile, compréhensible par tous. Après cette mise au point, cette expression du sens de cette formation, ce qu’on vient y chercher, l’état des ressources qu’un tel endroit peut prodiguer, une visite des espaces de la ferme était nécessaire pour définir le lieu d’implantation de cette construction.
Sur le terrain
L’après-midi fut consacrée à la mise en route du chantier de la porcherie. Il s’agit bien de mettre au jour une présence forte, pas seulement un ajout… Il faut que cet élément fabriqué soit moteur et pousse à des prolongements, des suites.
Il y a aussi toute la question du regard des autres, l’œil du spectateur, quelle interpellation désire-t-on susciter…?
En effet, cette construction doit avoir un impact, c’est un défi qui sera visible longtemps par le défilé d’enfants et d’adultes qui se succède sur le site. Il faut aussi qu’une unité, un consensus se dégage, afin qu’une idée devienne l’objet de tous, un projet. Plusieurs axes d’actions se sont ainsi dégagés .
Dans un premier temps, la mise à jour des besoins et de l’identification des limites pour cette réalisation. Plusieurs maquettes en argile avaient été réalisées par des groupes d ‘enfants et l’équipe d’animateurs concernant cette construction. Le partage des avis sur ces réalisations en lien avec le choix des enfants a porté sur une maquette représentant une tête monumentale de cochon qui servirait d’abri. Ce temps d’échanges fut suivi d’un débat sur le choix des matériaux. Diverses techniques furent évoquées. Le polyester est assez cher, pas vraiment adapté au lieu et est une technique déjà maîtrisée par l’équipe ; le bois est un matériau qui sera vite détruit par l’animal…Comme l’équipe désirait aborder une nouvelle technique, ce fut une construction en voile de béton qui a été retenue.
Choix du lieu d’implantation : Il fallait encore choisir le lieu. Le second accès des enfants à la ferme semblait faire l’unanimité puisqu’il permettait à la fois d’être proche de la ferme et de valoriser une entrée de la ferme. Au niveau du terrain, cette construction viendra s’adapter en prolongement d’un bâtiment en bois destiné aux chevaux. Il s’agit donc de prolonger un volume existant.
De plus, dans ce lieu d’accueil que constitue La Prairie, il y a un autre défi : faire de ce qui sera créé durant ce temps de travail intensif, le projet de tous pour lui assurer un suivi, un avenir. Plusieurs limites sont toutefois apparues à l’implantation de cette construction : Il fallait laisser un passage pour l’accès occasionnel des charrois agricoles (plateau de foin et de paille, tracteur agricole, accès pompiers…) ; étudier l’espace pour 2 animaux maximum ; prévoir un nettoyage aisé des lieux en prévoyant un accès à hauteur d’homme…
Après une brève recherche de matériaux (dont nous disposions déjà en grande partie suite aux différents stockages lors des projets précédents), le travail de traçage put commencer. » La construction : Suite du traçage sur le sol et démarrage du chantier proprement dit avec une initiation au maniement des outils de pliage des barres en fer. Il fallait d’abord mettre tout le monde d’accord sur l’image forte qui se dégagerait. Il fallait une tête qui ne soit pas statique. Donner du mouvement aux quelques éléments qui le permettaient et principalement aux oreilles.
Une initiation à la soudure fut aussi importante et prit un bon moment, la majeure partie des stagiaires découvrant le maniement d’un poste à souder. Des groupes de stagiaires se mirent au travail, les uns initiant les autres, supervisés par l’artiste-formateur, garant de coordination du travail. Il fallut ensuite accrocher le grillage qui retiendra le béton. Technique bien connue des artisans-coffreurs mais tout à fait nouvelle pour les stagiaires. Il y eut ensuite tout le travail des mélanges pour arriver à un béton ni trop liquide, ni trop sec…pour remplir les espaces grillagés.
L’expérimentation de techniques : travail de préparation à l’habillage de la construction. Parallèlement à ce travail monumental, un autre groupe se mit en recherche d’expérimentation de nouvelles techniques. Ce travail préparatoire à l’étape d’habillage de la structure porcherie, orienta 3 stagiaires vers des techniques moulages. Un travail particulier a été mené sur les empreintes d’insectes. Durant cette semaine, plusieurs techniques ont été expérimentées. Des essais ont été réalisés en silicone, en plomb, en plâtre, en résine d’inclusion.
Dans le même temps, un travail approfondi a eu lieu avec des éléments naturels et plus particulièrement avec des écorces de bouleaux. Enfin, une réflexion sur la mosaïque a pris une bonne partie de la seconde moitié de la formation. (dessins réalisés par les enfants) L’objectif de ce travail étant d’éprouver des techniques qui seront réutilisées durant les périodes d’animation avec les enfants.